Opium noir (4) : Import-export

Rapport de mission n° 87
Date de la mission: Mai 1926
Agents :

Un groupe d’agents de la BMS part enquêter en Egypte sur ce réseau de traficants, et apprennent des autorités britanniques le caractère réellement international de cette organisation tentaculaire.

Les inspecteurs de la Montmorandière et Durieux, après avoir convenu avec Dante Nardi de rester en contact, se précipitent à l’hôpital pour récupérer l’inspecteur Lafleur et la mettre à l’abri d’éventuels tueurs de Karaboudjian. Ils se rendent tous à Cassis, dans un hôtel discret, où ils se remettent de leurs émotions après avoir rendu compte du raid désastreux à la BMS à Paris. Contacté au téléphone, le commissaire Fèvre leur promet l’envoi de renforts qui partiront dès demain.

18 mai 1926

quatre agents de la BMS prennent le train aux aurores à la gare de Lyon : les inspecteurs-chefs Marinette Valois et Rémy Martel ainsi que les inspecteurs Etienne Bonnefoy et Barnabus de Saint-Véran. Bonnefoy revient de sa première mission qui semble l’avoir fortement perturbé car on décèle chez lui des tics nerveux... Quant à Barnabus de Saint-Véran, c’est un nouvel agent qui vient d’être recruté pour ses talents de médium. Après un voyage sans histoires, ils arrivent à Cassis le soir et retrouvent leurs trois collègues attablés à un restaurant sur la place de la mairie, en train de déguster une bouillabaisse.

Les agents discutent de la stratégie à adopter. De la Montmorandière suggère de se rendre en Egypte où la police anglaise doit avoir des choses intéressantes à révéler sur Karaboudjian et son organisation. Barnabus de St-Véran surprend tous ses collègues en proposant une séance de spiritisme dans laquelle il compte interroger l’esprit des gens qui ont perdu la vie dans le cadre de cette affaire. Certains agents le regardent avec scepticisme mais la majorité est prête à accepter.

Rentrés à leur hôtel, les agents se rendent dans une de leurs chambres et la séance commence. Sceptiques, Durieux et Bonnefoy restent dans le couloir... Pour « chauffer » le médium, la séance débute par l’invocation de l’esprit de la vieille tante de l’inspecteur Lafleur, prénommée Hortense, qui selon elle est partie avec le secret de la cache de ses économies. Le rituel commence... et rien. De St-Véran persévère... et les agents voient un verre bouger légèrement sur la table. En fait, c’est toute la pièce qui tremble ! Les agents restés dans le couloir le perçoivent aussi. C’est un petit tremblement de terre qui secoue Cassis, on entend en effet dans la rue « Vé ! Vous avez senti, vous ôssis ? La terreu trembleu ! »

Certains agents sont convaincus des pouvoirs de médium de St-Véran, d’autres renforcés dans leur scepticisme. La tante Hortense refuse en tout cas d’être plus bavarde...

C’est alors qu’il tente d’interroger l’esprit de Vincentello Biguglia et Dominique Ornelli, les deux gangsters de Volponi assassinés le 3 juillet 1925 par les hommes de Karaboudjian. Après un long silence... rien ! Un agent plaisante « ce sont des corses, et même morts ils ne répondront jamais à une question d’un flic ! »

Une majorité des agents doutent des pouvoirs de leur collègue, qui va maintenant interroger l’esprit de l’inspecteur du Belloy de Saint-Liénard, disparu l’avant-veille dans la villa Capri. Rien ne se passe... sourires moqueurs autour de la table. C’est alors que l’inspecteur Bonnefoy, resté dans le couloir, entre brusquement dans la pièce et parle de la voix de l’inspecteur du Belloy de Saint-Linéard ! Il raconte alors à ses collègues médusés comment lui et son groupe de gangsters se sont fait décimer par un sombre rejeton de Shub-Niggurath et des gardes libanais.

« J’étais parti avec cinq hommes à travers le maquis. L’un d’eux, Marius, avait une mitraillette, et deux autres portaient une mitrailleuse. Nous partions donc confiants... Mais nous sommes passés à côté d’une créature ressemblant à un arbre et qui était parfaitement camouflée dans la végétation. Ses tentacules se sont saisis de Marius et l’ont littéralement broyé. Moi-même et deux truands tirons sur la créature, tandis que les deux autres installent la mitrailleuse sur son trépied. La créature leur fonce dessus et ils paniquent et s’enfuient... Ils se font rattraper et tuer, on entendait leurs hurlements horribles. On a alors couru vers la maison, la créature nous poursuivant. Un truand est happé par ses tentacules pendant la course et tombe, colonne vertébrale brisée. J’arrive alors à découvert dans un champ d’oliviers donnant sur l’arrière de la maison. Deux gardes libanais étaient en poste, ils abattent mon dernier compagnon d’infortune. Je cours comme un diable, la créature sur mes talons, et arrive bientôt à couvert contre une dépendance de la maison. Malheureusement un tir me traverse la jambe et je m’écroule, puis la créature a fini le travail. J’ai vu un long tunnel de lumière dans lequel je me suis engouffré, pour me sentir flottant désincarné au-dessus de la scène où je pouvais voir mon corps horriblement mutilé. J’ai vu la créature courir vers l’autre côté de la maison, où votre groupe attaquait et échangeait des coups de feu avec des gardes. Puisse mon témoignage vous aider à me venger et à mettre hors d’état de nuire ceux qui contrôlent ces monstruosités. Il faut maintenant que je retourne dans le néant... »

Ce faisant, un ectoplasme sort des narines de Bonnefoy et disparaît. Ce dernier reprend connaissance devant ses collègues médusés.

De la Montmorandière conclut : « Bon ! Il n’y avait qu’une de ces créatures, et nous l’avons abattue... »

19 mai 1926

 : Alors que les clients de l’hôtel parlent du tremblement de terre, de la Montmorandière décide de partir pour l’Egypte et invite les agents à vérifier si leurs passeports sont en règle. Les inspectrices Lafleur et Valois n’en ont pas, ce qui ralentira leur départ le temps d’en faire un à la préfecture des bouches du Rhône... Il a alors l’idée de faire de faux papiers avec le concours de Dante Nardi qu’il va revoir à la maison de Volponi, tandis que d’autres agents achètent des billets pour un navire partant le soir pour Port-Saïd. De la Montmorandière convient avec Nardi que celui-ci mettra un homme de confiance autour de la villa Capri pour la surveiller. « Tu pourras toujours compter sur moi, petit, quand il faudra retourner faire le coup de feu contre ce fils de pute de Karaboudjian ! » lui confie le vieux gangster. Pour les faux papiers, il lui confie une adresse d’un ami qui fera gratuitement le nécessaire.

Cependant, avant d’embarquer, de la Montmorandière organise une descente musclée au siège de la Karaboudjian import-export, dans le but d’y trouver des renseignements mais aussi de provoquer Karaboudjian avant de prendre le large. Les locaux, situés rue Mazagran, abritent le directeur Michel Benayoun ainsi que deux employés. Tandis que deux agents isolent les employés dans une pièce, de la Montmorandière mène un interrogatoire assez agressif du directeur à qui il déclare « vous faîtes partie d’un groupe de trafiquants de drogue, un de mes collègues à été tué par votre boss, nous vous ferons tomber ! » Il lui arrache un médaillon qu’il possédait, représentant un sombre rejeton de Shub-Niggurath stylisé vu de haut et que portaient également les gardes de Karaboudjian.
Pendant ce temps, l’inspecteur Durieux aidé de ses collègues épluche la comptabilité. Ils découvrent que la société fait de l’importation de produits libanais, figues, olives, bois, etc... Pour un petit profit. Deux cargos sont affrétés par la société, le « Baalbek » et le « Smyrna », qui assurent une liaison bimensuelle avec Beyrouth. Les enquêteurs remarquent que les marchandises importées sont très en dessous de la capacité de transport des navires, qui offrent leur espace vide à d’autres sociétés (dont l’armée française) à des prix presque à perte, couvrant à peine les frais d’équipage et le mazout. Un gros client de la Karaboudjian import export est la SAB, Société Agricole de la Bekaa, dirigée par un certain Etim Djemblatt. Ils notent également l’achat par la société de 4 hydravions Schreck-FBA 17 au prix de 1 100 000 F en janvier 1925. Deux sont partis au Liban. La société possède également un troisième cargo, le « Sirius », immatriculé à Saigon, qui transporte du fret entre l’Indochine, Pondichéry et Djibouti.

Sous les protestations du directeur, les agents de la BMS quittent les locaux après l’y avoir séquestré pendant près de quatre heures. Ils se dirigent vers le port, sauf les inspectrices Valois et Lafleur qui rentreront à Paris. Leurs faux-papiers font en effet peser un risque sur le groupe, de plus l’inspectrice Lafleur étant toujours blessée il ne serait pas sage de la faire partir. Autant qu’elle reste en France dans un lieu sûr effectuer sa convalescence.

Ce sont donc cinq agents de la BMS qui quittent Marseille pour l’Egypte, non sans un certain soulagement !

du 20 au 25 mai 1926

 : Le voyage en bateau se déroule sans histoires et les agents profitent d’une courte escale à Malte pour faire un peu de tourisme dans le port de La Valette. L’inspecteur chef de la Montmorandière soigne ses blessures par balles reçues à Marseille.

A Paris, les deux inspectrices font un rapport détaillé des aventures marseillaises aux commissaires principaux Fèvre et Conti. Un rappel de tous les agents de la Brigade est organisé par le commissaire Laspalès qui souhaite une frappe décisive contre l’organisation Karaboudjian.

25 mai 1926

 : Les inspecteurs de la Montmorandière, Martel, Durieux, Bonnefoy et de Saint-Véran arrivent à Port-Saïd le matin et se rendent chez le consul Monsieur de la Maisonneuve à qui ils présentent leur ordre de mission.

Celui-ci leur trouve un logement discret dans la ville. Ils partent en fait directement en train pour le Caire dans l’intention de rencontrer le ministre égyptien de la justice pour avoir des éclaircissements sur l’affaire Karaboudjian. Voyageant assez luxueusement en première classe, ils arrivent en début d’après-midi dans la capitale Egyptienne et se trouvent un hôtel confortable d’ailleurs tenu par un français, surnommé Monsieur Pharaon.

Ils se rendent immédiatement au ministère égyptien de la justice mais et, faisant état de leur qualité de policiers français, obtiennent qu’un rendez-vous avec Monsieur Nassim Tanit, le directeur de cabinet de son excellence le ministre. Il leur apprend que le ministre, Zawab Pasha, a agi à la demande du haut-commissaire britannique de l’époque, Lord Allenby, pour obtenir un jugement et la condamnation de Joseph Karaboudjian. Les anglais ont fait part à son gouvernement de la découverte à Suez dans le navire « Le Sirius » d’une importante quantité de drogue (de l’opium). Son capitaine, arrêté et emprisonné, s’en est évadé le soir même et s’est reparti la nuit même sur la mer rouge, à bord de son navire, enlevé au nez et à la barbe des soldats anglais qui devaient en assurer la garde ! Ce navire et son armateur avaient déjà été soupçonnés d’importer de la drogue en Egypte car une dénonciation a eu lieu en 1920 et le navire a été fouillé à Port-Saïd alors qu’il revenait de Beyrouth. Rien n’avait été trouvé mais à ce qu’il sait l’officier qui a mené la fouille, un hindou nommé Alimar Singht, est mort d’une crise de démence en 1924, sans doute due à un excès de drogue. Il aurait donc été acheté.

Monsieur Tanit n’en sait pas plus que ne veulent bien lui en dire ses honorables protecteurs anglais qui assurent le service des douanes du pays par un traité. Le trafic de drogue est sévèrement puni dans son pays et la peine de mort est la punition habituelle contre les trafiquants. Il leur indique également savoir que des règlements de compte ont lieu dans la pègre égyptienne, comme le montre le terrible carnage ayant eu lieu dans la demeure d’Ergul Isman, le frère d’un gros trafiquant turc du Caire, assassiné avec toute sa famille dans sa maison. Les Anglais mènent l’enquête et il les invite à rencontrer les enquêteurs au palais du haut commissaire, Lord Lloyd.

Le remerciant en lui promettant de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour arrêter et capturer Karaboudjian, les agents de la BMS se rendent aussitôt au palais du haut-commissaire britannique mais n’obtiennent pas de rendez-vous et sont promenés de bureaux en bureaux, n’obtenant aucun interlocuteur de réelle importance.

Ils se promettent de revenir et retournent à leur hôtel où ils passent une agréable nuit malgré la chaleur ambiante.

26 mai 1926

 : le matin les agents prennent le temps de profiter des lieux. Barnabus de Saint-Véran s’est levé assez tôt pour aller dans un hammam. En revenant dans sa chambre, il trouve un égyptien en train de fouiner dans son armoire où sont rangés ses vêtements et en particulier sa veste. L’Egyptien, semblant un peu surpris, bredouille « room service, sir ! » et fait mine de brosser les vêtements. De Saint-Véran le laisse faire et le suit discrètement quand il a fini, l’homme quitte en fait l’hôtel assez vite et grimpe dans la rue sur une moto conduite par un complice, qui se perd rapidement dans la circulation.

Mis au courant de l’incident, Monsieur Pharaon, le directeur de l’hôtel, semble sincèrement désolé et demande si quelque chose a été volé (ce qui n’est pas le cas). Après enquête auprès du personnel, il s’avère qu’une femme de ménage dit s’être fait voler son passe-partout lui servant à ouvrir les chambres.

De la Montmorandière invite ses collègues à la méfiance et propose au groupe à tenter une nouvelle fois à se faire recevoir auprès du haut-commissaire britannique. Peine perdue, à la fin de la matinée ils ont comme la veille été promenés de bureau en bureau sans trouver d’interlocuteur d’importance.

En rentrant à leur hôtel à midi, ils ont la surprise de trouver deux automitrailleuses de l’armée britannique garées juste devant, avec un officier fringuant avec son stick semblant les attendre. C’est d’ailleurs le cas, et il les invite à monter dans les véhicules car « un représentant du gouvernement de sa majesté souhaite leur parler ».

Après un trajet assez inconfortable dans ces véhicules surchauffés par le soleil, les joueurs se retrouvent dans une caserne des environs du Caire où l’on les conduit dans une pièce richement meublée dans laquelle une table est dressée avec un somptueux repas. Deux hommes les y attendent, seul l’un d’entre eux, un rouquin aux sourcils broussailleux, se présente : « Vous pouvez m’appeler « K » ».

Ce nom dit quelque chose aux agents puisque des anciens de la BMS ont déjà rencontré ce personnage-clé de l’intelligence service britannique à plusieurs reprises pendant la grande guerre. L’inspecteur Martel l’a même déjà aperçu lors de sa première mission, à Istanbul en 1922. « K » est à la tête d’une branche de l’intelligence service spécialisée dans le surnaturel, s’il était français il travaillerait pour la BMS... ou le deuxième bureau !

Il salue chacun des agents en les appelant par leur nom. Il espère que ses hommes « ne les ont pas trop effrayés » et les invitent à passer à table et à entamer le repas. Il entame la conversation sérieuse par cette phrase : « Ainsi, vous venez en Egypte pour enquêter sur Karaboudjian... Mes services le recherchent également. Que pouvez vous me dire sur lui ? »

L’inspecteur chef de la Montmorandière incite d’un regard expressif tous ses collègues à la prudence. Il entame sur conversation d’une grande subtilité avec « K », ne lâchant une information qu’en échange d’une autre... A la fin du repas, chaque partie semble satisfaite. Les agents ont alors appris les choses suivantes :

  Karaboudjian a commencé à apparaître sur la scène égyptienne en 1920. L’unique navire de sa société, le Sirius, a été dénoncé aux autorités comme transportant du hachisch produit au Liban. Le navire a donc été fouillé dès son arrivé à Port-Saïd par un détachement de soldats menés par un officier indigène, le lieutenant Alemar Singht. Il en est ressorti déclarant ne rien avoir trouvé. Karaboudjian en personne était sur le navire. Le lieutenant Singht s’est tiré une balle dans la tête en 1924, il semble qu’après cette visite il ait été victime de crises de démence et de terribles cauchemars nocturnes. Le dénonciateur de Karaboudjian était un commerçant grec de Port-Saïd du nom d’Aristide Trochanis, sans doute pas très net et travaillant dans le trafic de hachisch lui aussi, comme beaucoup de grecs égyptiens. Il vit toujours à Port-Saïd, et n’a rien révélé d’autre à l’Intelligence Service.
  En 1924 la société de Karaboudjian s’étoffe et compte désormais trois navires. Le « Sirius » voyage désormais entre la Méditerranée et l’Indochine. En 1924, alors qu’il revient de Saigon, il subit à Suez une fouille inopinée des autorités douanières. On y trouve une importante quantité d’Opium, ainsi que de l’opium mélangé à une curieuse substance noire... Le capitaine du navire, un libanais du nom de Maurice Imad, est aussitôt emprisonné et le navire mis sous séquestre. Pendant la nuit, Imad s’est évadé de sa prison et s’est enfui sur son navire avec son équipage vers la mer rouge, au nez et à la barbe des autorités portuaires ! La réalité est encore plus terrible : deux créatures volantes ont été vues au-dessus de la prison, l’une d’elle portant un homme dans ses pattes. Cet homme s’est fait déposer à l’intérieur du mur d’enceinte de la prison, et de façon surnaturelle le mur de la cellule de Maurice Imad s’est effondré, libérant le prisonnier qui s’est enfui avec son mystérieux libérateur, portés par les deux créatures volantes. C’est évidemment à partir de cet instant que les services de « K » se sont intéressés à Karaboudjian.
  « K » pense que Karaboudjian n’est ni plus ni moins qu’un trafiquant de drogue utilisant le mythe de Cthulhu pour parvenir à ses fins et terroriser ses concurrents. Le caïd de la drogue local en Egypte est un turc du nom de Reïs Isman, il possède un important réseau de petits revendeurs et est donc un intermédiaire obligé pour tout importateur. Karaboudjian est en train de « s’expliquer » avec lui, soit pour le contraindre à travailler pour lui, soit pour l’éliminer. Il se trouve qu’il y a quelques mois, un carnage a eu lieu à la maison du frère de Reïs, Ergul Isman, qui est décédé ainsi que son épouse, trois de ses fils, quatre de ses filles, cinq invités et huit serviteurs. Officiellement, c’est une bombe qui a provoqué ce carnage. Officieusement, « K » pense qu’il s’agit d’une énorme créature volante invoquée. On a retrouvé des grosses traces de mâchoires dans les colonnes en pierre de la maison...

« K » se fit expliquer toute l’affaire parisienne de trafic de drogue. Il conclut l’entretien en demandant que les agents fassent pression sur le gouvernement français pour que celui-ci accède à la demande d’extradition du gouvernement égyptien... L’inspecteur de la Montmorandière lui répond que la BMS fera en tout cas tout ce qui est en son pouvoir pour le mettre définitivement hors d’état de nuire.

Prenant congé de leur homologue britannique, les agents se font conduire en ville et se précipitent envoyer un télégramme à Paris pour les informer de la situation.

Ils se rendent sur les lieux du massacre de la famille d’Ergul Isman. La maison est pillée et semble en ruines... Les agents découvrent des traces caractéristiques du passage d’une créature majeure du mythe de Cthulhu, avec notamment des traces de mâchoires dans une colonne en marbre. Ils décident d’aller rendre visite au parrain de la drogue local, Reïs Isman, qui a pignon sur rue. Ils se font guider par des jeunes mendiants et pénètrent dans les rues mal famées du Caire, et, encerclés par une foule d’arabes, parviennent à se faire ouvrir la porte du trafiquant. Un serviteur les mène dans une grande pièce dans laquelle est dressée une table. Autour d’elle une vingtaine d’Egyptiens habillés plutôt richement finissent un repas présidé par Reïs lui-même. Introduits par un serviteur, les agents sont finalement reçus par Reïs dans son bureau, après que celui-ci eut congédié ses invités. Les agents proposent à Reïs leur aide contre Karaboudjian. Dès que son serviteur lui traduit la phrase, Reïs entre dans une grosse colère que certains agents perçoivent comme étant feinte. Sans l’aide du traducteur, ils comprennent que Reïs leur profère diverses insultes et menaces, aussi ils s’esquivent aussi vite qu’ils le peuvent et quittent la maison. Suivis dans la rue par des arabes assez agressifs, ils parviennent à rentrer à leur hôtel. Cette entrevue rappelle à l’inspecteur chef de la Montmorandière la situation du parrain marseillais Volponi, qui est somme toute assez semblable...

Se sentant surveillés à leur hôtel, les agents décident de repartir dès le lendemain pour Port-Saïd.

27 mai 1926

Dès le matin, les cinq agents ont fait leurs valises et ont appelé un taxi en direction de la gare. Sur le devant de l’hôtel, alors que le groom charge leurs bagages dans le coffre, une voiture fait irruption dans l’avenue et ses cinq occupants leur tirent dessus au fusil ! L’inspecteur Martel, qui était resté au niveau de la porte de l’hôtel, tombe grièvement blessé par une balle qui lui traverse la jambe et vient briser la vitre de la devanture de l’hôtel. Restés dans le hall, Bonnefoy et Durieux tirent sur leurs assaillants avec leurs armes de service sans parvenir à les toucher, leurs cibles étant trop loin pour leurs revolvers. A la voiture se trouvaient de la Montmorandière et de St-Véran. Ce dernier se cache derrière la voiture et tiraille avec son revolver sur les assaillants dont trois sont sortis de la voiture et se rapprochent de l’hôtel. St-Véran en blesse légèrement deux... De la Montmorandière, rendu paranoïaque depuis qu’il enquête sur cette affaire, avait à portée de la main son fusil de chasse à canon scié. Il s’est caché derrière la voiture un moment, puis en est sorti brusquement déchargeant ses deux canons armés de balles. Si le premier coup manque sa cible, le deuxième fracasse la tête d’un bandit qui tombe foudroyé. S’en est trop pour les assaillants qui doivent faire face à cinq hommes armés ripostant de toutes leurs armes (même Martel, bien que blessé, leur tire dessus à terre !) Ils fuient sans demander leur reste, laissant le corps de leur camarade tué par de la Montmorandière.

Le reste de la journée est consacré à l’explication avec la police égyptienne (qui n’a pu identifier le corps du bandit tué) et la surveillance à l’hôpital de l’inspecteur chef Martel qui y est soigné. Des tours de garde sont organisés la nuit...

28 mai 1926

Dès l’aurore, les agents sont dans le train pour Port-Saïd, Martel étant une jambe dans le plâtre.

Ils arrivent à leur destination en milieu de matinée et reprennent contact avec Monsieur de la Maisonneuve, consul de France, pour un hébergement discret. Ils se sentent épiés... Ils se renseignent également sur Aristide Trochanis, qui dénonça Karaboudjian en 1920. Le consul les renseigne en leur indiquant qu’il s’agit d’un homme d’affaires grec assez riche qui est souvent vu au grand hôtel de Port-Saïd quand il est en ville. Il doit d’ailleurs s’y trouver en ce moment.

Les agents, très méfiants lors de leurs déplacements, décident d’aller l’interroger et ils le trouvent en train de jouer aux cartes au grand hôtel. C’est un homme d’une cinquantaine d’années, avec une petite moustache, vêtu d’un blaser bleu marine à boutons dorés, d’un pantalon blanc et d’un chapeau. Il se montre ravi de renseigner des inspecteurs de police français sur Joseph Karaboudjian, un homme « très dangereux » selon lui.

Il leur apprend que Karaboudjian serait originaire du village de libanais de Yanta, situé dans la plaine de la Bekaa, où doit être produite la drogue qu’il exporte. Tous ses lieutenants dans son organisation doivent également en être originaires :

  Etim Djeblatt, le directeur de la Société Agricole de la Bekaa.
  Welid Samda, le resposable de la Karaboudjian import/export au Liban. L’adresse est 6 rue Saladin, à Beyrouth.
  Maurice Imad, le capitaine du Sirius
  Talat Klat qui est son homme de confiance à Port-Saïd.
  Il a également entendu parler d’un certain François Ayub qui serait responsable d’un « bureau » au Caire.

Karaboudjian fait équipe avec le Turc Reïs Isman, au Caire, qui lui écoule sa drogue par son réseau de revendeurs. La collaboration de Reïs serait plus ou moins forcée... Karaboudjian est un psychopathe dangereux qui s’installe sur le marché égyptien de la drogue par la force. Ce serait faire œuvre de salubrité publique que de l’éliminer.

Leur entretien avec Trochanis terminé, les agents télégraphient immédiatement ces nouvelles à Paris et décident de quitter l’Egypte devenue bien trop dangereuse pour eux. Si Karaboudjian a un homme de confiance à Port-Saïd, il doit être certainement dans l’ombre d’une ruelle prêt à agir...

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