Monsieur ! Monsieur ! Vous oubliez votre chapeau...

Rapport de mission n° 92
Date de la mission: Août 1926
Agents :

Où un chapeau oublié conduit les agents de la BMS dans une chasse au vampire toute vaudevillesque...

Paris, août 1926. Lundi soir.

Quatre agents de la BMS se retrouvent en milieu de soirée dans une grande brasserie parisienne après une éprouvante journée de filature. Il y a le célèbre Commissaire Laspalès, et les inspecteurs Marinette Valois, Charles Beaumont, et Edmond Bourreau, une nouvelle recrue.

La brasserie est bien pleine et les agents remarquent un couple sur une table à côté de la leur. L’homme est un gigolo vêtu d’un costume à la dernière mode, cheveux gominés en arrière, une fleur sur la veste et chaussures « Charleston ». La dame est jeune et assez jolie, très maquillées et joliment vêtue sans être à la dernière mode. Elle se lève alors pour aller aux toilettes se repoudrer, laissant seul le playboy. C’est à ce moment là qu’entre un homme d’aspect sévère, vêtu de noir avec des lunettes d’écaille. Il porte une canne et une épaisse mallette de docteur. L’homme sévère s’assied à une table et regarde le playboy en fronçant les sourcils. Ce dernier, s’en rendant compte, quitte la brasserie précipitamment en oubliant son chapeau.

Laspalès, goguenard : "Ah ! C’est le mari..."

L’homme sévère fait mine de le suivre mais un serveur le retarde en lui demandant ce qu’il prendra. A ce moment la femme revient, le regard assez étrange. Elle ne trouve personne à sa table et s’évanouit. Tout le monde dans le bar se précipite et les agents, les premiers à son chevet, découvrent qu’elle en fait très pâle, ce que cache son maquillage. Comme elle ne reprend pas connaissance, le commissaire Laspalès la conduit à l’hôpital dans sa voiture de service. Il prend le chapeau du playboy avec lui et demande au patron du bar d’orienter son propriétaire vers le commissariat, s’il venait à se manifester... La dame est confiée aux bons soins de l’hôpital le plus proche, d’après ses papiers elle s’appelle Mme Perrichon et vit à Paris dans un quartier huppé. L’interne de garde n’est pas capable de renseigner les agents sur le mal dont elle souffre, revenez demain...

Quant à l’homme sévère, il s’éclipse discrètement... L’inspecteur Charles Beaumont le suit. Il prend le métro, puis sort à Montmartre... L’homme l’a repéré et lui tend une embuscade, le faisant chuter par un croc en jambe avec sa canne. Beaumont, à terre, se fait menacer : "Monsieur je vous demande d’avoir l’obligeance de bien vouloir arrêter de me suivre, sans quoi je me verrai dans l’obligation d’appeler la police !" (Voix de Louis Jouvet) L’inspecteur ne se décourage pas, continue sa filature mais le perd finalement.

Mardi matin.

Le lendemain (mardi), le commissaire trouve dans son courrier un mot du propriétaire du chapeau :

“Monsieur le Commissaire,

Le patron de la brasserie m’a dit que vous aviez récupéré mon chapeau, auquel je tiens beaucoup. Devant m’absenter de Paris toute la journée de demain, je vous propose un rendez-vous le soir à 21 heures au café de la Grande Roue. Je vous offrirai le champagne pour votre dérangement...

Enrico Cortez”

Avant de reprendre leur journée de service, Laspalès décide de faire un tour à l’hôpital s’informer de l’état de santé de Mme Perrichon. A leur grande surprise, alors qu’ils sont encore dans la rue sur le trottoir face à l’entrée, ils voient l’homme sévère de la veille dévalant l’escalier et s’engouffrer dans un taxi qui par hasard se trouve là. Il est poursuivi par deux gangsters revolvers au poing qui s’emparent d’une voiture particulière qui circule dans la rue. Le commissaire Laspalès sort son arme et crie « Police ! », les malfaiteurs tirent et une fusillade éclate. Edmond Bourreau tombe après avoir pris une balle, un gangster est abattu dans la voiture. Laspalès, ayant son Mauser enrayé, réquisitionne une voiture conduite par un curé, tandis que Charles Beaumont monte sur le marchepied. Laspalès appuie sur le champignon, mais tamponne sans faire exprès le chauffeur de la voiture prise par les gangsters et qui s’est retrouvé sur la chaussée. Les deux agents et le curé connaissent une frayeur en fonçant tête baissée à travers un carrefour à grande circulation, ce qui leur permet de rattraper la voiture des gangsters qui de toute façon a eu un accident. L’unique gangster survivant, sérieusement blessé, est rapidement maîtrisé.

Les agents blessés et le gangster survivant reçoivent rapidement des soins (pratique de se tirer dessus à côté d’un hôpital...) et parviennent à reconstituer ce qui vient de se passer quelques minutes auparavant. Les gangsters sont venus enlever la régulière de leur boss, Mlle Scalzi, qui semble-t-il a eu des virées nocturnes dont elle ne veut rien dire... A leur grande surprise ils découvrent l’homme sévère en train d’interroger sa voisine de chambre, Mme Perrichon. Ils s’exclament « Là ! Le joli cœur ! » et se ruent vers lui pour l’assommer, mais leur proie parvient à s’esquiver.. Deux gangsters le coursent (ceux qu’ont rencontré les agents), et deux enlèvent Mlle Scalzi.

Ils apprennent tout ceci de la témoin de la scène, Mme Perrichon, qui semble aller mieux que la veille mais n’a absolument aucun souvenir de la soirée, tout comme elle dit ne pas connaître d’Enrico Cortez. L’homme sévère qu’elle disait voir pour la première fois s’est présenté sous le nom de Robert Molyneux, spécialiste de l’amnésie. C’était la première fois qu’elle disait l’avoir vu.

Selon son médecin traitant, ce n’est pas la première fois que Mme Perrichon a des crises d’amnésie sélective. Le docteur serait normalement assez sceptique sur la réalité de ses crises, mais observe qu’à chaque fois sa patiente est très malade et présente d’importantes chutes de tension. De plus, Mlle Scalzi, dont c’était la première visite, souffre du même mal qu’elle : chute de tension, et amnésie de sa vie nocturne. Elle a été amenée là lundi matin, des gardiens municipaux l’ont en effet trouvée complètement perdue dans un parc par de Montmartre. Etrange...

L’hôpital porte plainte pour l’enlèvement de sa patiente, Mlle Scalzi, et le commissaire Laspalès se saisit de l’affaire. Ses collègues découvrent que dans la bagarre de la chambre d’hôpital, l’homme sévère alias « Robert Molyneux » a oublié sa mallette. Il y a dedans tout un attirail de touriste, un plan de Paris, un guide touristique (annoté "Robert Molyneux - Nogent sur Marne"), un Passepartout, un maillet de menuisier, un opinel de belle facture, et un casse croûte avec deux pommes, du pâté Enaf, une boite métallique de biscuits, un saucisson à l’ail et une bouteille d’eau (pleine) de forme peu commune... Egalement un billet pour une pièce au théâtre du parc "Un chapeau de paille d’Italie", un Vaudeville d’Eugène Labiche, pour la représentation de jeudi soir.

Lapalès, après enquête et interrogatoire, se rend compte que Mlle Scalzi est chanteuse dans un cabaret et est la « régulière » du caïd des gangsters de l’hôpital. Elle est partie plusieurs nuits avec un homme, ce que le caïd n’a pas du tout apprécié. Il a envoyé ses gorilles lui faire la peau, ces derniers ont remarqué qu’un homme sévère (Molyneux) tournait dans la journée autour de Scalzi... Ils ont essayé de le serrer mais il leur a échappé une première fois. Puis ils ont retrouvé la trace de Mlle Scalzi à l’hôpital, et la suite, vous la connaissez. Laspalès prévient alors ses collègues de la brigade antigang. Le commissaire Andréani se montre très intéressé par cette affaire, car le gangster arrêté à l’hôpital est un homme de main d’un bandit de premier ordre, surnommé « Le sicilien », recherché pour le casse du crédit municipal de Marseille. Les deux flics se mettent d’accord sur un échange d’informations...

Le soir, tout le monde va au rendez-vous du propriétaire du chapeau, le playboy Enrico Cortez. Ils ont des questions à lui poser. Ce dernier, très mondain, est assis à une table où se trouve un sceau à champagne et deux coupes. Il reprend son chapeau, remercie Laspalès, et se retrouve pressé d’une foule de questions. Il reconnaît connaître Mme Perrichon, mais les liaisons extraconjugales ne sont pas interdites... A ce moment arrive dans le bar Simone Villette et son fils Marcellin, et dirige vers Laspalès qui est assis face à Cortez. Elle désigne Laspalès à son fils, et lui dit "Voici ton père !", et à Lapalès "Voici ton fils !" - rire des agents, Mlle Villette fait scandale dans la brasserie, et tout le monde, serveurs comme clients, regarde la scène, au point qu’un petit attroupement se forme autour de leur table. Laspalès bafouille, et... on se rend compte que Monsieur Cortez a disparu comme par enchantement !

Mercredi.

La première chose que fait Laspalès le matin ; virer de la BMS la secrétaire qui a renseigné son ex- où il se trouvait hier soir ! Il passe sa journée à s’occuper des formalités pour reconnaître sa progéniture, dont il doit payer les études au collège. Les inspecteurs Beaumont et Bourreau vont enquêter sur Molyneux à Nogent sur Marne.

Le soir, Laspalès et Marinette Valois, restés à Paris, vont surveiller Mme Perrichon chez elle, avec son accord. Son mari est en voyages d’affaires... Soudain, Mme Perrichon devient toute bizarre. Une clé s’introduit dans la porte, une homme monte : il est armé, c’est Monsieur Perrichon qui voit Laspalès qu’il croit être l’amant de sa femme. Ca crie, pistolets sortis... Derrière Perrichon, Laspalès voit Molyneux avec sa canne (qui fait office de pieu) et un Maillet. Il dit "Il est là !" en regardant derrière Laspalès. Effectivement, Cortez est dans un coin de la chambre et Laspalès remarque qu’il a des crocs de Vampire ! Mme Perrichon est sur son lit en transes. Le Vampire lance une attaque mentale vers Molyneux, mais Monsieur Perrichon bouge entre les deux en hurlant "Vous allez tous sortir de chez moi !". C’est lui qui prend l’attaque mentale, et tombe sur le lit. Mais derrière Molyneux apparaissent deux Gangsters, dont l’un lui donne un coup de matraque sur le crâne. Molyneux tombe, l’autre gangster tire sur le Vampire, avec Laspalès et Valois. Molyneux, non assommé, se débat et bouscule un gangster dont le coup de feu est dévié dans la lampe de la pièce, la plongeant dans le noir complet...Le combat continue dans l’obscurité. Quand l’inspecteur Marinette Valois rallume la lumière, Cortez, Molyneux et un gangster ont disparu, ne laissant que Monsieur et Madame Perrichon et un autre gangster assommé.

Jeudi.

Le lendemain jeudi, les deux agents revenus de Nogent sur Marne apprennent à leur chef que Molyneux n’est autre que le petit -fils de Simone Pouffiot, une chasseuse de vampires que la BMS connaît bien ! Note : c’est là qu’ils se sont rendus compte qu’il s’agissait d’une histoire de vampires (bon sang mais c’est bien sûr ! Le saucisson à l’ail !), Laspalès et Valois s’en étant bien sûr rendu compte chez M et Mme Perrichon.

Les agents conseillent alors à M et Mme Perrichon d’aller prendre l’air dans leur villa à Deauville pour leur sécurité. Laspalès fait relâcher le gangster assommé en lui disant que la personne qu’ils recherchent s’appelle Cortez, que l’homme sévère qu’il a assommé n’a rien à voir. Cortez drogue ses victimes qui perdent toute volonté, la poule de votre boss n’a pas fiat cela de son plein gré... Avant de le relâcher, il prévient le commissaire Andréani qu’il va remettre dans la nature un loustic qui le conduira peut-être au sicilien.

Le soir, quatre agents se rendent au théâtre (Commissaire Laspalès, Mlle Valois, Charles Beaumont, Edmond Bourreau) et surveillent tout ce qu’ils peuvent. Rien, personne de suspect. Laspalès et Valois assistent au premier acte tandis que les deux autres fouillent tout le théâtre : rien.

Entr’acte. Les spectateurs vont boire un pot dans le hall. Laspalès et Valois y retrouvent leurs deux collègues bredouilles. C’est alors qu’on sonne la reprise. Ils voient alors Cortez fendre la foule vers la sortie, comme s’il était poursuivi ! Ils le suivent dehors et le voient escalader la façade (de façon surnaturelle) et aller sur le toit. Il était en fait poursuivi par Molyneux, qui, malin, est resté au premier étage pour l’observer dehors du balcon. Comme il l’aperçoit grimper, il part le rejoindre sur le toit par l’escalier de service.

Les trois hommes de la brigade font de même dare-dare ! (Christelle qui jouait Mlle Valois est tombée dans les bras de Morphée...). Poursuite sur un toit, avec vue sur Paris la nuit illuminé... Le vampire et son chasseur sont rentrés dans les greniers. Les agents les y suivent... Après quelques péripéties, les agents se retrouvent face au vampire (qui a semé son chasseur) dans un grenier où l’on range des décors. Un combat a lieu, les armes à feu se révèlent inefficaces. Tous les agents tombent victimes des pouvoirs psychiques du vampire. Alors que tout semble perdu, Molyneux fait son apparition à l’autre bout de la pièce, et le vampire s’enfuit ! Molyneux se rue à sa poursuite mais butte sur Edmond Bourreau qui était par terre dans le gaz. Il se vautre et se tord la cheville ! Le commissaire Laspalès relève ses hommes et part à la poursuite du Vampire. Mais Molyneux le retient : il lui donne un médaillon qui le protègera avec ses compagnons des attaques psychiques du vampire. Il lui conseille de lui empaler le coeur avec une arme blanche, la seule façon de le tuer...

Laspalès et ses hommes fouillent le théâtre une fois de plus, mais rien. Alors qu’ils sont sur le point d’abandonner ils le retrouvent dans une pièce sombre du rez-de-chaussée, pleine de cordages et de décors. Le vampire leur échappe en forçant une porte. Ils se ruent à sa poursuite et se retrouvent... Sur scène !

La scène représente une place d’un village d’Italie du siècle dernier, avec un puits au milieu. Au balcon d’une maison, une jolie jeune fille. Sur la place, un Roméo, poursuivi par un vieux mari cocu, qui fait de grands moulinets avec un sabre, ce qui fait bien rire le public.

LE VAMPIRE : Argh !

LES AGENTS : Il est là !

LA JEUNE FILLE : Mais... Qu’est-ce !

LE ROMEO ET LE MARI COCU : Quoi ?

DES GANGSTERS, DANS LES PREMIERS RANGS, SORTANT DES ARMES : C’est lui ! Le joli coeur !

DES VOIX, AU FOND DE LA SALLE : Commissaire Andréani, Police ! Rend-toi, le sicilien !

INSPECTEUR CHARLES BEAUMONT : Je suis Grosjean comme devant !

Rires de toute la salle. Les agents de la BMS se précipitent sur le Vampire, et basculent dans la bagarre dans le puits où ils tombent sur un matelas (une trappe de scène). Sous la scène, commence alors un furieux combat face au souffleur terrifié !

LE SOUFFLEUR : Haa ! C’est horrible !

LE MARI COCU (En haut sur scène) : ?... Ah c’est terrible !

LE ROMEO : Euh... Mais non, ce n’est pas terrible Monsieur ! Je vous dis que je ne connais pas votre femme...

(bruits de poursuite dans la salle - Police rendez vous ! - rires et applaudissements des spectateurs)

Des coups pleuvent sur le vampire, qui a sorti ses dents et fait mieux que se défendre avec sa force surhumaine. Les agents finissent par le ceinturer et au moment de l’empaler ils se rendent compte que leur pieu est un peu émoussé et surtout qu’ils ont perdu leur maillet dans le feu de l’action. Le vampire se libère. Laspalès crie : Le sabre ! Le sabre dans le puits !

LE SOUFFLEUR : Le sabre dans le puits !

LE MARI COCU : Euh... Mon sabre dans le puits !

LE ROMEO : Euh ?... Oui ! Débarrassez-vous donc de votre arme, Monsieur, et discutons calmement !

(rires dans la salle)

Le sabre tombe sur le matelas. Bourreau s’en saisit, tandis que Laspalès et Beaumont parviennent à ceinturer le vampire une fois de plus. Bourreau lui plonge la lame dans le coeur et il se dissout instantanément en squelette. Laspalès et Beaumont se relèvent avec calme, s’époussettent, et s’en vont après avoir mis les os du vampire dans une petite caisse d’accessoires qu’ils emmènent avec eux, le tout après avoir salué le souffleur livide.

Molyneux avait disparu entre temps. Son médaillon rejoint l’arsenal étrange de la BMS...

Quant au Commissaire Laspalès, il fait les gros titres des journaux pour sa contribution (peu orthodoxe au demeurant) dans l’arrestation du sicilien.

Liens | Contacts | Recherche
lancer la recherche