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Rapport de mission n° 123
Date de la mission: Février 1937
Agents :

Un agriculteur du Jura, quelque peu dérangé, dénonce à un journaliste local en mal de scoop qu’il a été témoin depuis fort longtemps de sabbats se déroulant dans les forêts de son village. Il attire l’attention de la BMS quand il est mentionné comme étant décédé dans le bulletin général de police, retrouvé suspendu en équilibre sur deux branches d’un arbre... Les agents de la BMS envoyés sur place découvriront des indices troublants, mais ne parviendront pas à confondre le culte Cthuloïde qui sévit dans la région.

11 février 1937 (Jeudi).

La brigade mobile spéciale décide de dépêcher un groupe d’inspecteurs pour aller enquêter sur le décès survenu le 9 février d’un habitant de Chatonnay, petit village du Jura du canton d’Arinthod, que le bulletin général de la police décrit dans sa rubrique « bizarreries » comme ayant été découvert couvert d’ecchymoses, avec une jambe déboîtée, suspendu sur les branches d’un arbre comme s’il en était tombé du sommet. Plus troublant, la victime, nommée Fernand Ruchon, avait déclaré dans la presse locale (article du 7 février 1937 du journal « Le progrès », signé Jean Claude Lecomte) quelques jours plus tôt avoir depuis toujours été témoin de sabbats d’adorateurs du diable dans les forêts du secteur.
Le rapport de gendarmerie, signé de l’adjudant chef Pajon, chef de la brigade d’Arinthod, indique que le corps de M. Ruchon a été trouvé par un voisin, Monsieur Robert Balmer, et que M. Ruchon était connu comme étant particulièrement dérangé depuis la mort de son épouse en 1935. Leurs deux fils sont morts au champ d’honneur pendant la grande guerre.

Le commissaire principal Laspalès décide en conséquence d’ouvrir une enquête et confie à l’inspecteur principal Philippe Evrard (n°133) la responsabilité d’une équipe d’agents, composée de l’inspecteur principal Antoine Moulin (n°147), des inspecteurs Pierre-Paul Oujac (n°154) et Charles Legrasse (n°155) ainsi que de l’inspecteur stagiaire Germain Lanquetot (n°156). Sitôt l’ordre de mission reçu, les agents s’engouffrent dans une Citroën de la brigade et se dirigent en voiture vers le Jura... Le voyage est sans histoires mais marqué par de nombreuses poses cigarettes, l’inspecteur Oujac ayant été gazé pendant la guerre on ne peut fumer en sa présence ! La voiture de la BMS arrive vers vingt heures sous un cile maussade à Lons le Saunier, préfecture du Jura comptant environ 13 000 habitants. Les agents n’ont pas un grand choix d’hôtels à leur disposition et se dirigent vers l’hôtel de la gare, le seul établissement confortable, où le patron, Monsieur Ernest Turel, a des chambres disponibles. Après avoir monté leurs bagages et s’être rafraîchis, les agents vont se restaurer et se régalent d’un gros plat de saucisse de Morteau et de non moins grosses parts de fromage Morbier, le tout arrosé de vin du Jura. Deux autres clients de l’hôtel mangent au restaurant : le commandant Guillarme, officier nouvellement muté au 44e régiment d’infanterie de Lons le Saunier, et qui est sur le point de s’installer en ville ; ainsi que Monsieur Gordon Martins, citoyen britannique qui se présente comme un représentant en outillage et travaux d’hydraulique agricole, et qui effectue une tournée dans le secteur. Les agents se présentent comme des policiers et partagent un digestif avec eux ainsi qu’avec le patron M. Turel. Tout le monde va ensuite se coucher.

12 février 1937 (Vendredi)

Le lendemain les agents se prennent un solide petit déjeuner, servi par une dame de chambre prénommée Jacqueline qui leur demande s’ils comptent manger à midi, et à laquelle ils répondent par l’affirmative. Pendant ce temps, Monsieur Turel lit la presse et peste contre le gouvernement Blum et la semaine de quarante heures, qui tuent l’esprit d’entreprise. « Quarante heures ! Pourquoi pas trente-cinq pendant qu’on y est ! ». Les agents lui demandent s’ils connaissent un journaliste local nommé Jean Claude Lecomte, il leur répond que non. « Ou plutôt si ! Ce n’est pas le journaliste qui est mort dans un accident de la route hier ? » Stupéfaits, les agents se ruent sur l’ancien exemplaire du Progrès (Edition du Jura) qui traîne à la réception et découvrent effectivement un petit article rendant hommage au journaliste, mort dans un accident de la route le 10 février sur la commune de Chatonnay, sur la route départementale n°3 reliant Arinthod à Saint-Julien. Comme le journal dispose de bureaux à Lons le Saunier, où sont écrites les pages locales de l’édition du Jura, les agents s’y précipitent sans tarder.

Ils y rencontrent immédiatement le directeur, Monsieur Mélenchon, qui se montre surpris de voir autant d’enquêteurs débarquer dans son bureau pour un accident de la route. Il se montre néanmoins coopératif et indique que M. Lecomte, qui n’avait pas la trentaine, était un journaliste ayant travaillé au « Détective » et qui a atterri ici en étant imposé par la direction de Lyon, sans doute par pur copinage. Le style quelque peu voyeuriste de M Lecomte détonne un peu dans ce petit quotidien local : il est allé jusqu’à écrire un article sur les déboires conjugaux du préfet ! Il possédait une voiture Peugeot 402 couleur bordeaux, qu’il aimait conduire de manière « sportive » ; aussi l’accident de la route ne l’étonne pas. Il n’était pas marié et avait une fiancée, prénommée Lucienne, dont il donne l’adresse. Plus intéressant, il ouvre aux agents l’accès du bureau de Lecomte, qui est fouillé méticuleusement. Ils en tirent ses notes de frais (frais d’essence et facture du restaurant d’Arinthod où il a mangé le midi du 10 juste avant l’accident) ainsi que son carnet de notes dont la dernière page se révèle particulièrement instructive. Elle y contient divers noms, visiblement notés en vrac au moment où il a interrogé Ruchon : « Pierre Grand jau, route de la Boissière, solstice d’été, Mégévand, Bouton, Lamarthe, Maynal + étranger, hommes + femmes, grands arbres ».

Evrard, Moulin et Oujac se précipitent à la morgue où le corps de Lecomte se trouve peut-être. Ils arrivent précisément au moment de la mise en bière (en présence d’un gendarme) et peuvent voir le corps : visage tuméfié, le croque mort leur confirmant qu’il ressemble bien à tous les accidentés de la route qu’il a l’occasion de s’occuper. Le corps va être transporté sur Lyon. Les agents interrogent le gendarme sur l’endroit où se trouvent ses affaires personnelles, il leur répond « au groupement de gendarmerie ». Evrard et Moulin s’y dirigent sans tarder, tandis qu’Oujac se dirige aux archives.

A la gendarmerie, les deux inspecteurs se trouvent face à un mur : le commandant Jacquelin, chef du groupement, refuse de leur donner accès au dossier de M. Lecomte sans l’aval de son supérieur le lieutenant colonel Lefort, chef de la gendarmerie départementale. Il promet de les contacter dès que ce sera fait, Evrard leur donne les coordonnées de leur hôtel qu’ils rejoignent pour se restaurer. Evrard en profite pour se renseigner sur Gordon Martins auprès de M. Turel, qui lui répond qu’il est là depuis près d’un mois, que c’est la première fois qu’il le voit, et qu’il a payé sa chambre jusqu’au 15 février inclus.

Pendant ce temps, Lanquetot a cherché a interroger la fiancée de Lecomte mais ne trouve que sa voisine, qui indique que la demoiselle est partie pour Lyon assister à l’enterrement de M. Lecomte. Il rejoint alors Legrasse, puis Moulin, aux archives départementales et effectuent des recherches sur tous les faits étranges s’étant déroulés dans la région, en particulier au niveau du solstice d’été mais ne trouvent rien de concluant et font une pose sandwich sur le tard. Les trois agents sont ensuite rejoints par Evrard et Oujac qui passent au préalable à la Préfecture pour obtenir copie de la liste électorale de Chatonnay : la commune comporte 12 électeurs : 5 Mégévand, 2 Bouton, 1 Lamarthe, 2 Maynal, 2 Balmer et Ruchon, maintenant décédé. Mme Ruchon serait décédée le 18 novembre 1935, renseignement pris au tribunal de grande instance où se trouve copie des registres d’état-civil.

Le soir, retour à l’hôtel où Monsieur Turel indique qu’un gendarme a déposé un message pour l’inspecteur Evrard, qui est convoqué le lendemain à 9 heures à la préfecture. Les agents prennent un repas copieux en présence, comme la veille, du commandant Guillarme et de M. Gordon Martins.

13 février 1937 (Samedi)

Evrard se rend à la convocation à la préfecture accompagné de Lanquetot et d’Oujac. Ils ont la surprise de se retrouver sous les dorures de la grande salle de la préfecture, autour d’une table où se trouvent le préfet (M. de Maisonneuve), le secrétaire général de la préfecture (M. Jules Michet) et deux officiers supérieurs de gendarmerie, le lieutenant colonel Lefort (chef de la gendarmerie du Jura) et le commandant Jacquelin, chef du groupement de Lons le Saunier, rencontré la veille. M. Michet fait les présentations tandis qu’entre une dame de service qui propose aux agents un verre de vin ou un autre rafraîchissement. Le préfet, après avoir commandé un café, prend la parole. Il s’interroge sur le fait que pas moins de cinq inspecteurs de la police nationale viennent enquêter sur un simple accident de la route. Le Lt-Col Lefort, droit comme un i et chapeauté de son képi à cinq ficelles, rajoute « et sur une enquête de la compétence de la gendarmerie nationale ! ». Le préfet soupçonne la famille de Lecomte, qui a des appuis hauts placés, d’avoir diligenté via le ministère de l’intérieur des policiers qui mettent des bâtons dans les roues à ses services, lesquels fournissent un travail « irréprochable ». L’inspecteur Evrard fait un remarquable travail de diplomatie, approuvant les propos du préfet, et expliquant le contexte de la disparition de M. Lecomte en rapport avec un article rapportant des messes noires dans la forêt. La brigade mobile spéciale mène une enquête de routine sur ce genre de dérives sectaires et s’ils sont venus à cinq, c’est tout simplement parce qu’il a amené avec lui des inspecteurs stagiaires (il désigne Lanquetot). Monsieur le préfet se détend et promet alors toute la collaboration de ses services, demandant au lieutenant colonel un plein et entier concours de la gendarmerie. Les agents suivent ensuite le commandant Jacquelin au groupement de gendarmerie où on leur confie le dossier de l’accident de M. Lecomte, une sortie de route sur un virage d’une route de montagne. Le corps, éjecté du véhicule, a été trouvé par le médecin de Saint Julien, arrivé sur les lieux alors que le drame a déjà eu lieu. M. Lecomte, identifié par l’adjudant chef Pajon de la brigade d’Arinthod, n’avait aucun effet personnel particulier ni sur lui, ni dans sa voiture.

Pendant ce temps, Moulin et Legrasse ont négocié la location d’une voiture auprès d’un garagiste. Après avoir mangé, les agents partent au complet dans deux voitures vers Arinthod où ils arrivent après trois quarts d’heure de route. C’est un beau village au charme médiéval certain mais les inspecteurs ne s’attardent pas à faire de tourisme et se dirigent vers la décharge publique où se trouve l’épave de la Peugeot 402 de Lecomte. Elle est déjà désossée de toute pièce détachée encore utilisable (roues et phares arrières), l’avant est complètement plié. Les agents ne trouvent aucune trace visible de sabotage du véhicule, néanmoins l’un d’eux, fort perspicace, découvre la trace de peinture vert kaki sur la porte arrière droite... Il est fort possible que la voiture ait en fait été poussée dans le ravin ! La couleur kaki amène à supposer que la voiture a été percutée par un camion Berlier, utilisé en grand nombre par les agriculteurs qui en ont fait l’acquisition dans les surplus militaires après la grande guerre.

Puis ils se dirigent vers Chatonnay, petite commune du canton située dans la forêt dominant la plaine où se trouve Arinthod. Ce n’est pas un village à proprement parler, mais plutôt un assemblage de fermes ; l’une d’elles, située au bord de la route départementale, héberge une pièce tenant lieu de mairie. Ils frappent à la porte et une femme ouvre une fenêtre à l’étage du bâtiment, les agents demandent où se trouvent la ferme de M. Balmer et elle appelle son mari, le maire (M. Isidore Mégévand), qui leur indique leur chemin.

La ferme de M. Balmer est plus loin en contrebas de la départementale 3. Ils y rencontrent M. Robert Balmer (son frère Henri vit aussi à Chatonnay) qui leur confirme ce qu’il a décrit aux gendarmes, insistant même sur le fait que son pauvre voisin avait complètement perdu la tête depuis le décès de sa femme et qu’il avait l’habitude de grimper aux arbres pour guetter on ne sait trop quoi. C’est en venant rapporter des outils qu’il lui avait emprunté qu’il a découvert le corps juché dans un arbre, en équilibre sur deux grosses branches. Il est visiblement tombé de plus haut et a dû se briser tous les os du corps, une de ses jambes étant déboîtée. Interrogé sur la présence d’un Pierre Grandjau au village, il répond ne connaître personne de ce nom là, mais que le Grand Jau est le nom d’un lieu-dit de la commune qui appartient au père Mégévand.

Les agents remercient M Balmer et se dirigent ensuite vers la ferme de M. Ruchon. La maison est assez décrépie, mais les animaux ont l’air convenablement nourris, sans doute par M. Balmer. La porte est fermée à clé et Evrard essaie de la crocheter, sans succès. C’est alors que Moulin repère une lucarne au dessus de l’appentis et commence à escalader le toit, il glisse et chute sur le sol heureusement boueux mais se tord sérieusement la cheville. Legrasse escalade à son tour et parvient à entrer dans la maison par la lucarne, ouvrant ensuite la porte de l’intérieur, et permettant aux agents d’en faire une fouille complète. Remuant coffres et armoires, ils finissent par trouver une cache contenant un tas dos enveloppés dans un tissu. Parmi ces os, une alliance sur laquelle est inscrite « Dante et Flavia »... Peu compétents en anatomie, les inspecteurs n’identifient pas l’origine de ces os mais emmènent cette pièce à conviction important dans le coffre de leur voiture. Quelques agents tournent autour du grand arbre où a été trouvé le corps de M. Ruchon, et perçoivent comme des renfoncements dans la terre tout autour, comme si une créature titanesque l’avait foulée. Inquiets par la tombée de la nuit, ils décident de ne pas s’éterniser et rentrent d’urgence à Lons le Saunier.

Une fois sur place, Evrard se rend à l’hôpital et demande à rencontrer un chirurgien pour qu’il identifie les ossements trouvés. Le praticien lui indique que ces ossements proviennent d’origines variées, beaucoup d’animaux mais aussi des ossements humains, comme par exemple un morceau de fémur, qui a été broyé par un outil ressemblant à un poinçon d’environ 10 cm. Evrard pense secrètement à la mâchoire d’une créature du mythe de Cthulhu, remercie le praticien et lui laisse les os lui précisant qu’ils sont une pièce à conviction dans le cadre d’une enquête de police.

Les agents rentrent ensuite à leur hôtel assez tard, se restaurent seuls et prennent une nuit de sommeil.

14 février 1937 (Dimanche)

Le lendemain matin, les agents prennent leur petit déjeuner en la seule compagnie du commandant Guillarme, habillé en tenue d’apparat pour se rendre à la messe. M. Gordon Martins n’est pas là, Evrard s’en inquiète et apprend que M. Martins est passé hier soir avant le repas puis a filé à l’anglaise dans rester manger... Montrant sa carte de police à M. Turel, il se fait ouvrir la chambre de l’anglais et fouille ses affaires. Il ne trouve rien d’autre que des vêtements et des factures de la SNCF pour de la livraison de fret. Sur le registre de l’hôtel, il est écrit que M. Gordons Martins est domicilié à Bridgnorth, dans le comté de Severn. Regardant un atlas, Evrard trouve une ville nommée Goatswood à côté (le bois de la chèvre), dont le nom lui semble résonner comme un lieu de culte satanique !

Puis les agents se précipitent à la gendarmerie et demandent à consulter les archives du groupement sur les personnes disparues, Evrard rendant compte aux gendarmes de la découverte des ossements. Ils découvrent 4 fiches signalétiques de personnes disparues (en 1889, 1913, 1929 et 1934), tous des représentants de commerces ou ouvriers agricoles itinérants, dont la disparition a été signalée quelques jours avant le solstice d’été (le 21 juin). Une demande de recherche à la BMS dans les archives du service historique de la gendarmerie à Vincennes permet d’obtenir deux fiches de disparus sous le 2e empire, en 1853 et 1868, tous deux quelques jours avant le 21 juin. Parmi les disparus plus récents, il y a un prénommé « Dante »... Aux archives départementales, ils parviennent à se procurer une vieille version du cadastre leur permettant de localiser la parcelle « Le grand Jau ». Elle appartient à la famille Mégévand et plus précisément à un certain Joseph Mégévand sur la version cadastrale datant de près de 40 ans.

Les agents décident à visiter la parcelle du Grand Jau à Chatonnay, mais demandent (et obtiennent) le renfort d’une dizaine de gendarmes armés que mène personnellement le commandant Jacquelin. Suivant la route de la Boissière, ils bifurquent dans un chemin rural, passent à côté d’une ferme (celle de la famille Mégévand) et découvrent le grand Jau, un champ isolé des regards par plusieurs bosquets. Ils investissent le champ prudemment et ne trouvent aucune grosse pierre pouvant servir d’autel, comme les notes de Lecomte le suggéraient. En revanche, ils trouvent un renfoncement dans le champ avec de la terre fraîchement retournée, comme si un gros rocher de la taille d’un menhir en avait été retiré ! Il aurait fallu dans ce cas de gros engins de levage. Comme autour de l’arbre de M. Ruchon, on trouve de nombreux renfoncements dans la terre. Puis les agents organisent une battue à la recherche d’ossements, rien n’est trouvé excepté quelques petits os d’animaux dans un fossé.

Pendant la battue, un des gendarmes s’est aventuré à la lisière de la forêt et a découvert un autre champ à proximité, caché par une rangée d’arbres. Au milieu de ce champ se trouve un pylône sur une petite base bétonnée... Les agents s’en approchent avec les gendarmes, et s’arrêtent devant ce champ à l’orée du bois. Un sentiment de malaise les parcourt, on n’entend que le vent et aucun bruit d’oiseaux. Les agents se rapprochent prudemment de la structure, armes sorties. Ils l’inspectent et découvrent que dans la base béton se trouve une trappe fermée par une porte métallique cadenassée. Un ronronnement en émane, comme venant d’un moteur électrique. Des fils sortent précisément de cette trappe, longent les pieds du pylône et semblent alimenté au sommet une curieuse boule métallique surmontée d’une pointe, d’un aspect très futuriste. Les agents font le tour de la structure puis décident d’aller interroger les habitants de la ferme Mégévand. Dans la cour de la ferme, ils rencontrent M. Robert Mégévand, apparenté au Maire, qui leur répond que le pylône sert aux prévisions météo et qu’ils ont signé un contrat avec des parisiens. Evrard, regardant dans la maison, aperçoit le grand-père assis dans un fauteuil avec une couverture sur les genoux. Il cherche surtout découvrir un camion Berlier dans le garage, mais ne trouve rien, et prend poliment congé.

Les agents discutent alors de l’attitude à adopter. Faut-il aller fouiller toutes les fermes de Chatonnay, dans le but de trouver un camion Berliet qui aurait des traces de peinture bordeaux sur le côté droit ? Dans ce cas, il faut une commission rogatoire d’un juge, qui serait obtenue sans difficulté lundi matin compte tenu des indices et présomptions graves. Mais d’un autre côté, ne faudrait-il pas rester surveiller ce pylône pour voir qui viendrait tourner autour ? Oujac, Lanquetot, et Moulin ne sont pas rassurés par l’atmosphère oppressante qui plane sur le lieu et optent pour revenir demain en force munis d’une commission rogatoire. Legrasse est persuadé que quelque chose va se passer ce soir, car la pierre du grand Jau a été escamotée et que les agents étaient visiblement attendus. Il tente de plaider le fait de rester secrètement sur place et de prendre les suspects en « flag ». L’inspecteur principal Evrard hésite... et se rallie finalement à la majorité de ses collègues, optant pour revenir demain avec une commission rogatoire.

Alors que les deux voitures de la BMS ainsi que la fourgonnette de gendarmes quitte Chatonnay, ils croisent une carriole contenant deux hommes et trois femmes qui suit le chemin inverse et se dirige sans doute vers la ferme Mégévand. Les agents laissent passer et rentrent sans tarder à Lons le Saunier. Ils tentent de se renseigner en appelant la base aérienne de Bron sur la présence de pylônes météo dans la région, on leur répond que rien de tel n’existe.

15 février 1937 (Lundi).

M. Gordon Martins n’est toujours pas passé à l’hôtel. Les agents se précipitent dès la première heure au tribunal et obtiennent sans difficulté d’un juge une commission rogatoire leur permettant de fouiller les fermes de Chatonnay, dans le but d’y trouver un camion Berliet portant des traces de peinture bordeaux. Ils débarquent en force dans le village avec des gendarmes et fouillent toute la matinée, sous les protestations du maire. Ils ne trouvent rien, pas même les traces d’un culte Cthulhoïde... Ils en profitent pour consulter l’état civil de la commune et constatent que celui-ci est incomplet et ne comporte pas l’acte de naissance de Joseph Mégévand. Ils rentrent alors à Lons Le Saunier et retournent au tribunal d’instance pour en obtenir une copie complète. C’est là qu’ils découvrent que Joseph Mégévand est né en... 1808, et a donc par conséquent 129 ans. Le moteur électrique sous le mystérieux pylône ne fonctionne plus, et Robert Mégévand indique qu’ils devaient le faire fonctionner jusqu’au 14 février. Il s’embrouille d’ailleurs sur l’identité de ces mystérieux parisiens de la météo qui lui ont acheté l’emplacement du pylône, et bafouille que cela a été signé chez un notaire à Lons dont il ne se souvient plus du nom. De retour à Lons le Saunier, les agents font rapidement le tour des notaires locaux et aucun ne se souvient avoir signé un tel acte...

16 février 1937 (Mardi)

Ayant le sentiment d’être arrivés trop tard pour frapper le culte, les agents décident de rentrer à Paris. C’est là qu’ils se renseignent sur la société de matériel agricole dont M. Gordon Martins se disait le représentant : elle n’a jamais existé... Ils se décident à rendre compte de l’échec de leur mission au commissaire principal Laspalès qui leur mettra sans nul doute une bonne engueulade.

Mes excuses aux habitants de Chatonnay et d’Arinthod qui tomberaient sur cette page par hasard : ce récit n’est que pure fiction, et il n’y a bien sûr jamais eu de culte satanique dans ces villages ! En revanche, la forêt et les paysages du Jura ont réellement quelque chose de fascinant, ce qui a guidé mon inspiration...

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