Opium noir (2) : De la Marne à la Canebière

Rapport de mission n° 84
Date de la mission: Mai 1926
Agents :

Poursuivant leur enquête, les agents de la BMS vont mener une descente dans un entrepôt des traficants dans la région parisienne et découvrir que le coeur du trafic se trouve à Marseille.

8 mai 1926 : Le commissaire Laspalès prend en main l’affaire après avoir passé une engueulade aux agents qu’il soupçonne d’avoir répandu des bruits dans la presse mondaine sur le fait qu’il aurait eu un fils caché en 1915 avec une prostituée. Retour à Paris de l’inspecteur de la Montmorandière, qui rend compte de la possible existence d’une salle de jeu clandestine chez « Mimile ».

Il est convenu que l’inspecteur Martel supervise une surveillance permanente du restaurant/fumerie d’opium « les splendeurs de Saigon ». La journée est consacrée à se trouver un lieu pour effectuer une planque, ainsi qu’à effectuer une enquête de voisinage qui ne donne rien sinon que plusieurs asiatiques semblent habiter dans les appartements au dessus du restaurant.

9 mai 1926 : 2eme journée de surveillance. Les agents découvrent que dans la journée, des asiatiques vont faire des livraisons d’opium noir au domicile parisien de certaines personnalités.

10 mai 1926 : 3eme journée de surveillance. Ils observent ainsi une livraison effectuée chez Edouard Charvelet, haut-fonctionnaire travaillant au secrétariat de la présidence du conseil, ainsi que du capitaine Philippe Labranche, du cabinet militaire du président de la république. Ce terrible réseau criminel semble donc avoir des oreilles dans tous lieux où s’exerce le pouvoir.

11 mai 1926 : Visite des inspecteurs De la Montmorandière, Lafleur, et Rapenaud à la Guinguette « chez Mimile ». Ils s’y rendent tous le soir et de la Montmorandière parvient à se faire admettre avec l’inspecteur Lafleur qu’il présente comme sa « poule » à l’intérieur de la salle de jeu clandestine qui se trouve sur une péniche. Ils constatent autour d’une partie de poker endiablée que l’on vend du hachisch au bar... Fait embarrassant, ils remarquent la présence de malfrats qu’ils ont combattus à la morgue il y a quelques jours ! Lafleur leur cache son visage en embrassant fougueusement son collègue, ravi de la situation. Pendant la soirée, Rapenaud est resté dehors surveiller la péniche. Un camion de livraison l’intrigue et il décide de le suivre avec la voiture du service. On ne le revit plus jamais. Les inspecteurs de la Montmorandière et Lafleur, sans voiture, en sont quittes pour marcher la nuit jusqu’au village le plus proche où ils dorment dans la dernière chambre libre de l’unique hôtel du village.

12 mai 1926 : Au matin, Laspalès accompagné de l’inspecteur de St Liénard retrouve les agents de la Montmorandière et Lafleur au café du village. Ces derniers lui demandent des nouvelles de leur collègue Rapenaud, comme il n’en a pas il déduit qu’il lui est arrivé malheur. Il ordonne alors une battue à sa recherche et réquisitionne les six gendarmes de la brigade locale au chef-lieu de canton. En patrouillant en voiture dans le secteur, ils finissent par trouver la voiture de Rapenaud dans un bois, près d’une grange suspecte occupée par des hommes qui ne ressemblent pas à des paysans. Ils planifient alors un assaut :
  Inspecteur de la Montmorandière avec deux gendarmes par le sud-est à travers champs. Ils sont armés d’un fusil-mitrailleur Chauchat.
  Commissaire Laspalès, inspecteur de St Liénard et deux gendarmes par le Nord-Est à travers champ.
  Inspecteur Lafleur sera chargé, avec deux gendarmes, de bloquer toute retraite aux malfrats en bloquant avec la voiture de service le chemin d’accès à la grange menant à la route.
L’assaut de la grange est assez sanglant et tous les bandits sont mis hors de combat, personne n’étant sérieusement blessé chez les gendarmes comme les agents de la BMS. Ils trouvent un stock de hachisch, d’opium et d’opium noir dans un camion de transport de la « société des transports de Provence ». Son chauffeur, qui était à l’hôtel du village pendant la fusillade, est inculpé de trafic de drogue, tout comme « Mimile ». Immédiatement un avocat marseillais, maître Cyril Mollard, prend sa défense indiquant que ce chauffeur ne savait pas ce qu’il transportait, etc., etc.... En attendant, tout ce monde, et surtout les malfrats survivants de la fusillade, sont mis au frais le soir. Ils y resteront longtemps car le corps de Rapenaud est retrouvé enterré dans un bois voisin.

13 mai 1926 : Interrogatoires des suspects incarcérés la veille et réflexion. Les obsèques de Rapenaud sont organisées pour le lendemain.

14 mai 1926 : Départ pour Marseille dans le train de nuit du commissaire Laspalès accompagné des inspecteurs de St Liénard, de la Montmorandière, Lafleur et Durieux. Ils arrivent vers 10h30 à la gare Saint-Charles. Visite à la gendarmerie, où ils réquisitionnent un peloton de gendarmes mobiles. Ils partent immédiatement effectuer une perquisition « coup de poing » à la société des transports de Provence. Tandis que les agents investissent le bureau du directeur, Monsieur de Merville, les gendarmes mobiles fouillent les garages et camions à la recherche de drogue.

Ils ne trouvent rien au bout de quelques heures, le directeur semble plus intéressé par sa voiture de sport et sa vie mondaine que par sa société. Il s’agit sans nul doute d’un prête-nom de Volponi et les agents le laissent partir mais embarquent les livres de compte de la société pour les examiner.

Puis ils se dirigent à l’hôtel de police pour rendre visite au commissaire Escagasse, qu’ils ont déjà contacté au téléphone quelques jours auparavant. Ce dernier les met en garde sur cette enquête où plusieurs personnes ont laissé la vie. Il semble plutôt résigné du fait que des gangsters marseillais bénéficiant d’appuis politiques, comme c’est le cas de Volponi, jouissent d’une certaine impunité. En revanche, il leur livre volontiers les informations dont il dispose sur Volponi et le trafic de drogue.
  En juin 1925 éclate une grève à la société des transports de Provence, ce qui est assez inhabituel car Volponi contrôle complètement les syndicats de « sa » société. Deux de ses hommes de main, Vincentello Biguglia et Dominique Ornelli, sont enlevés et leurs corps horriblement mutilés sont retrouvés le matin du 3 juillet 1925 devant la porte de la société. Le travail reprend alors. Escagasse pense qu’il s’agit d’un règlement de comptes entre « associés »...
  Un jeune journaliste au journal « Le Provençal », du nom de Séraphin Couffignal, menait une enquête sur le trafic de drogue. Il a été assassiné à la terrasse d’un café le 7 septembre 1925. Escagasse a été chargé de l’enquête : l’appartement de Couffignal a été « visité » peu avant ou après le meurtre, il a entendu sa petite amie Nicole Rascaguères ainsi que sa tante, Simone Bouzou, qui ne lui ont apporté aucun élément.
  Cette affaire de trafic a été prise en main par un juge énergique nommé François Sauler. Il a enquêté sur le sujet avec un policier qui lui était entièrement dévoué, l’inspecteur Hector Marchadier. Ce dernier disparaît le 24 mars 1926, et un mois plus tard le juge Sauler est muté en Algérie.
  Karaboudjian est venu dans la ville vers 1920. Il vit dans une villa entourée de champs d’oliviers, la « Villa Capri », dans un village au sud de Marseille. Il est le dirigeant d’une société, la Karaboudjian import/export, dont le siège est à Marseille (rue Mazagran). Il y a de forts doutes qu’il importe de la drogue du Liban, mais rien n’a été jusque là prouvé.

Les agents de la BMS poursuivent leurs investigations en allant à la capitainerie de la gare navale du bassin de la Joliette. Ils découvrent sur les registres que la Karaboudjian import/export possède deux cargos, le « Smyrna » et le « Baalbek », qui depuis 1925 assurent une liaison bimensuelle avec Beyrouth. Cette société possèderait un autre cargo, le Sirius, qui a quitté depuis quelques années la méditerranée pour l’Indochine d’où il semble faire des rotations entre Saigon, Djibouti et l’Inde.

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